Marketing

Vendre la marque GWG aux familles canadiennes

par Catherine C. Cole

La qualité des vêtements de travail adaptés à la rude vie de l'Ouest canadien que produit la Great Western Garment (GWG) pour les hommes et les garçons lui vaut une rapide notoriété. Adopté en 1918, son slogan, « They wear longer because they're made stronger » [ils durent plus longtemps parce qu'ils sont plus résistants], est repris pendant de nombreuses années dans ses publicités. Fermiers, cow-boys, mineurs, bûcherons et ouvriers de la construction - tout le monde porte des marques GWG telles que Cowboy King, Iron Man et Red Strap. Dans les années 1950 et 1960 au Canada, hommes, femmes et enfants apprécient de plus en plus les vêtements GWG. À compter de 1970, GWG cherche à pénétrer le marché des jeunes en plein essor, mais ne réussit pas à se défaire de sa réputation de fabricant de vêtements de travail. Cet échec l'empêchera de concurrencer les jeans de couturier dans les années 1980.

Publicité pour des tenues de ski Publicité pour des vêtements de jeux Pendant la crise des années 1930, GWG met en marché plus de 700 lignes de vêtements, dont un certain nombre pour femmes et enfants. Ses catalogues renferment un nombre très limité de pages consacrées aux femmes, et celles-ci sont toujours présentées dans des activités de plein air exigeant des tenues précises (ski, jardinage, etc.). De la même façon, les vêtements pour jeunes garçons sont conçus pour résister à des travaux ou des jeux « énergiques ». Publicité pour des vêtements de travail Publicités pour les marques Strapback et Frontier Queen Publicité pour des vêtements de loisirs et de travail

Vêtements décontractés

Alors que le tissu visant la confection de vêtements civils est rationné pendant la Seconde Guerre mondiale, GWG remplit les commandes des gouvernements pour des dizaines de milliers d'uniformes militaires et renforce sa capacité de production pour satisfaire à la demande. La guerre finie, GWG, en vue d'élargir son marché, augmente la fabrication de tenues pour femmes et enfants, confectionne aussi bien des tenues décontractées que des vêtements de travail et améliore sa distribution et ses ventes dans tout le Canada.

Publicité pour les marques Frisco Jeans et Frontier Queens L'équipe des ventes de GWG passe de deux personnes en 1911 à 35 en 1950. Les vendeurs de GWG sont tenaces. Comme le note l'un d'entre eux, « il y a des villes en Alberta que seul Dieu, Stanfield's [une marque de sous-vêtements] et GWG peuvent placer sur une carte ». Ils suivent les mouvements d'inventaire de leurs clients et leur suggèrent quoi commander. Dans les années 1950, GWG lance plusieurs marques pour femmes (entre autres Strapback et Frontier Queen) dont la coupe et les proportions, comme le souligne la publicité, sont conçues pour des femmes.

Dans les années 1940, les annonces de GWG mettent en vedette Stu Davis, un chanteur de musique country surnommé plus tard le « cow-boy troubadour du Canada » ; dans les années 1950 et 1960, elles font appel à plusieurs champions de rodéo. En 1958, deux nouveaux comédiens de Hollywood - Valerie Allen (apparue dans Vague de chaleur en 1958) et Peter Baldwin (qui participe alors au film Dans la souricière) - sont photographiés aux studios Paramount portant des vêtements GWG. La tenue Frontier Queen de Valerie Allen est qualifiée à cette occasion d'« éblouissante ». À notre connaissance, ce sont les seuls comédiens à avoir fait la promotion des produits GWG.

Publicité pour des vêtements d'école Publicité pour des vêtements de loisirs Publicité pour des vêtements de loisirs GWG continue de commercialiser les vêtements décontractés pendant toutes les années 1950. Elle cesse d'annoncer dans les publications régionales et opte pour des médias nationaux tels que Maclean's, The Star Weekly et National Home Monthly. En 1961, ses lignes sont vendues dans 5500 magasins de détail au Canada. On conseille aux enfants de porter des GWG à l'école, les Rocheuses sont maintenant représentées comme une destination de vacances plutôt qu'un lieu de travail et la publicité montre des hommes vêtus de GWG en train, non pas de travailler, mais de cuisiner au barbecue.

Publicité pour la marque George W. Groovy Publicité GWG Pour s'imposer dans le marché en plein essor des vêtements pour jeunes, GWG lance de nouvelles marques telles que Peace Jeans ou George W. Groovy (et, moins connue aujourd'hui, Grace W. Groovy). Un chanteur de rue de Greenwich Village, à New York, écrit la chanson d'une annonce publicitaire que beaucoup de bébé-boumeurs peuvent encore fredonner aujourd'hui. GWG lance aussi un slogan qui en dit long : « Anything Goes » [tout peut passer]. En 1972 apparaissent les Scrubbies, des jeans prélavés qui seront le plus grand succès de l'histoire de GWG.

Les catalogues de GWG comportent des descriptions en français à partir de la fin des années 1960. Pour la première campagne publicitaire nationale radiotélévisée lancée au début des années 1970, les annonces sont produites aussi bien en français qu'en anglais.

Publicité avec Wayne Gretzky Pull molletonné de Wayne Gretzky Publicité GWG Wayne Gretzky (dont le surnom « The Great Wayne Gretsky » lui vaut les initiales GWG) a grandi à Brantford et brièvement travaillé à l'usine de GWG comme commis de plancher. Plus tard, Gretzky sera la vedette publicitaire de GWG. La campagne de 1980-1981, « J'ai grandi avec GWG », comprenait une publicité télévisée, des silhouettes en cartons grandeur nature dans les magasins et des apparitions en public. Après l'échange de Gretzky et son départ pour Los Angeles en 1988, GWG continue de s'identifier à lui en faisant paraître une annonce : « The Great One is still in town » [l'« illustrissime » est toujours ici].

Conclusion

L'analyse des images dans les catalogues de GWG montre bien la transition entre une production principalement axée sur le vêtement de travail et celle qui s'adressera désormais à toute la famille. La première prédomine dans les catalogues de la fin des années 1930 : les hommes ont droit à 21 pages, à comparer à quatre pour les femmes et quatre pour les enfants. Le catalogue de 1942 propose 27 pages de vêtements masculins pour une page de vêtements féminins et quatre pages consacrées aux enfants. Quant au catalogue de 1950, il présente 38 pages de vêtements masculins pour six pages de vêtements (dont certains de travail) pour garçons et seulement deux pages pour les femmes. En 1959, GWG annonce un changement de cap en présentant des femmes en couverture de son catalogue, mais le catalogue lui-même ne consacre qu'une seule page aux vêtements féminins. L'année suivante, le catalogue compte huit pages de vêtements pour hommes et consacre une page chacun à la femme, à l'enfant et à la famille.

Le vrai changement se produit au cours des années 1960 et 1970 avec les nouvelles tendances culturelles comme le culte de la jeunesse entraîné par le boum des naissances, et le mouvement féministe. La couverture du catalogue de 1968 présente des jeunes ; cinq pages sont réservées aux vêtements masculins et cinq autres aux vêtements pour jeunes, laissant à la remorque les vêtements pour femmes et pour la famille qui ont droit en tout à deux pages. En 1970, les jeunes sont présents en page couverture et dans les pages intérieures : quatre pages de vêtements pour jeunes ; trois pages respectivement pour les vêtements féminins et masculins. Le catalogue de 1980 présente un couple en couverture ; à l'intérieur : sept pages de vêtements pour les jeunes et quatre pages de vêtements pour hommes. Même chose en 1981 : cinq pages de vêtements pour les jeunes, seulement trois pour les hommes.

Une stratégie de commercialisation efficace permet à GWG de s'imposer sur le marché des jeunes, mais la marque ne réussira finalement jamais à l'emporter sur les jeans de couturier.

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Publicité pour Nev'R Press produite pour GWG par McConnell-Eastman. Credit: Library and Archives Canada. (1:01)

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Sur des airs de musique de différents genres, la réclame prône l'achat de jeans Scrubbies prélavés si l'on veut passer plus de temps avec sa blonde ou son groupe de musique qu'à laver ses jeans.

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Sur un air de musique country, l'annonce affirme qu'on n'a plus besoin de laver et de frotter pour que les jeans aient l'air vieux et usé; tout ce qu'il reste à faire, c'est les porter et aller s'amuser. (1:02)

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Sur un air de boogie, l'annonce que porter des jeans, c'est cool, mais qu'on n'a pas besoin, pour les adoucir, de les laver et de les frotter deux, trois fois par semaine. (1:12)

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Sur un air yé-yé, le chanteur se plaint que les jeans qu'il faut laver et frotter l'empêchent de voir sa belle et promet d'acheter, la prochaine fois, des Scrubbies déjà délavés. (1:02)

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Pour en savoir plus sur l'Art des catalogues, avec Hall Smith