L'histoire de la GWG

La Great Western Garment à Saskatoon

par Victoria Lamb Drover

personnel du GWG à l'extérieure de L'usine Durant sa courte période d'exploitation, qui va de novembre 1973 à juin 1982, la succursale de Saskatoon de la Great Western Garment (GWG) n'en est pas moins l'un des plus gros employeurs de la « ville des ponts ». Au plus fort de son activité, 150 employés, surtout des femmes, y confectionnent des jeans en denim.

Projet pilote à Saskatoon

Au début de décembre 1972, devenue filiale à cent pour cent de Levi Strauss and Company, GWG décide d'installer la cadette de ses usines à Saskatoon. On a prétendu que GWG avait d'abord songé à deux villes de l'Est, pour finalement se rabattre sur Saskatoon à cause de la disponibilité de la main-d'oeuvre et des emplacements potentiels. L'idée de départ était de mettre en oeuvre un projet pilote dans le sous-sol du magasin Eaton sur Third Avenue South. Toutefois, GWG doit rapidement modifier ses plans lorsqu'un spéculateur, Riverside Real Estate, se porte acquéreur du bâtiment quelques jours avant la signature de l'entente. Réagissant promptement, GWG déniche aussitôt un autre local sur Duchess Street. Dès janvier, elle se met en frais de recruter et former une main-d'oeuvre locale, surtout composée de femmes. Le projet pilote va prendre de l'ampleur pendant les dix prochains mois et permettre l'embauche de 100 employés, facilitant ainsi grandement la transition vers une usine permanente qui ouvre ses portes avec 120 employés.

Aide gouvernementale

plans de L'usine Averties de l'intérêt de GWG pour Saskatoon, les autorités fédérales et municipales mettent tout en oeuvre pour faciliter cet investissement. Le 27 décembre 1973, Don Jamieson, ministre de l'Expansion économique régionale, annonce l'octroi d'une subvention de développement de 229 000 $ pour aider à la construction de l'usine de Saskatoon. De son côté, la Ville achète de la Saskatchewan Power Corporation un terrain de 0,95 ha convoité par GWG, à l'angle de 34th Street et Ontario Avenue. L'administration du maire Bert Sears revend ensuite à GWG pour 39 542 $ ce lot qu'elle a payé 38 000 $ - une opération blanche une fois les frais de transaction payés. Le contrat pour le dessin des plans et la supervision du chantier de construction d'une usine de 5110 m2 (55 000 pi2) est ensuite confié à une société d'Edmonton, Bentall Engineering. Le coût des travaux totalisera 1 250 000 $.

Inauguration

démonstration de couture Officiellement inaugurée le 30 novembre 1973, l'usine de GWG Ltd. à Saskatoon adopte une attitude extrêmement progressiste en matière d'emploi. Si, comme l'explique le directeur Brian Wilcox, « il peut s'avérer frustrant de vouloir échapper à la routine dans une usine de fabrication où la monotonie de la chaîne de montage influence l'ambiance de travail », l'entreprise n'en estime pas moins important « de se battre contre des conditions de travail prosaïques ». La nouvelle usine est gaiement décorée, aucune salle n'ayant deux murs de la même teinte, et la direction initie plusieurs projets pour favoriser une ambiance de travail chaleureuse, telles une terrasse adjacente à la cafétéria, ouverte pendant l'été, la diffusion de musique dans l'usine, une réduction des heures de travail le vendredi et une offre de stationnement gratuit avec prise pour le chauffe-bloc. Les anciens employés, dont Helen Faulkner qui a travaillé neuf ans dans cette usine, ont encore en mémoire les parties de quilles et les barbecues organisés par la direction. Ayant débuté comme opératrice dans la pose des poches avant, Helen Faulkner était à la fin de sa carrière la spécialiste chargée de broder la signature « GWG » sur les poches arrière. Ses collègues et elle parlent encore avec fierté du President's Club, un programme ouvert à tout le monde. Toute opératrice qui réussissait à travailler trois mois consécutifs sans déroger aux quotas assignés à chaque tâche gagnait une montre en or et un ticket pour le banquet annuel du Club.

Production et salaire

Ces initiatives sur le plan des ressources humaines n'empêchent pas l'usine d'avoir les yeux rivés sur la production. En 1973, 3500 jeans sortent chaque jour de ses installations (70 000 par mois). Les couturières sont réparties selon quatre catégories qui impliquent des degrés croissants de complexité de couture et différents taux salariaux de base. Par exemple, le salaire de base des employées de niveau 1 qui exécutent les tâches les plus simples (pose des passants, coutures d'entrejambes, etc.) débute à 2,14 $ de l'heure. Au niveau 4, les tâches sont plus longues et plus délicates (telle la couture des poches arrière). À chaque tâche correspond un minimum quotidien de lots de 60 unités. Le nombre de lots à terminer est plus élevé au niveau 1 - en général, 16 lots par jour ou 960 jeans - puisque les tâches sont plus simples et plus courtes à exécuter. En revanche, les quotas sont de 8 à 10 lots par jour (de 480 à 600 jeans) au niveau 4 étant donné le degré de complexité des tâches correspondant à cette catégorie. Le salaire des opératrices qui battent leur quota augmente en proportion. Par exemple, une opératrice de niveau 1 qui produit 24 lots par jour, soit 50 % de plus que son quota quotidien, obtient 1,07 $ de plus de l'heure. Anita Messaros, commise au service de la paie de 1974 à 1977, se rappelle que la plupart des « filles » gagnaient plus qu'elle. Terry Wishlow, opératrice de niveau 4 spécialisée dans la pose des poches, affirme avoir gagné très bien sa vie « pour une femme à cette époque » avec 300 $ net par mois.

Diversité de la main-d'oeuvre

Depuis le lancement du projet pilote sur Duchess Street, la majorité des opératrices sont des immigrantes fraîchement débarquées, originaires principalement du Vietnam et des Philippines. En 1982, les immigrants récents auraient constitué 67 % de la main-d'oeuvre de l'usine. Dans une ville où, selon Statistique Canada, la proportion d'immigrants reçus n'a que tout récemment atteint 8 % de la population totale, GWG comptait évidemment parmi les principaux employeurs d'immigrants.

Châteaux en Espagne

Atelier de coupe de L'usine Lors de la grande inauguration de GWG Ltd., le président, D.R. Gormley, prévoit que l'usine de Saskatoon atteindra rapidement sa pleine capacité de 250 employés. Par ailleurs, l'expansion de l'usine, planifiée pour 1977-1978, devrait permettre d'en doubler la superficie et, éventuellement d'employer 480 personnes. Ce plan optimiste ne se matérialisera jamais. La pénurie internationale de denim des années 1970 et l'effondrement de l'économie nationale rendront caduc ce plan de production.

Le taux salarial de base suit la courbe du salaire minimum de la province - toujours 7 à 10 % plus élevé que le salaire minimum légal établi pour un adulte canadien. Par exemple, le salaire minimum de la Saskatchewan est de 2 $ de l'heure en 1974 ; celui de GWG, de 2,14 $. Seules les employées directement affectées à la confection sont syndiquées. Elles sont représentées par la Section locale 486 des United Garment Workers of America. Le personnel de bureau et les employés de la cafétéria ne sont pas syndiqués. Parmi les anciennes travailleuses interrogées, aucune n'a le souvenir d'activités organisées par le syndicat. Une seule, Bernie Rousell, se souvient de réunions régulières. À l'emploi de l'usine de Saskatoon pendant huit ans, elle se rappelle que les réunions du syndicat étaient peu fréquentées et que le personnel et la direction étaient plutôt à tu et à toi - la politique de la porte ouverte encourageant l'écoute des préoccupations des employés.

Fermeture de l'usine

Des employés GWG quittent L'usine Cette atmosphère cordiale fit peu pour atténuer le choc de l'annonce de la fermeture de l'usine, le 24 juin 1982. Selon une autre personne interviewée, « nous savions que des usines allaient fermer, mais nous pensions que les choses allaient assez bien et que notre usine à nous ne serait pas touchée ». Les 150 employés furent tour à tour remerciés au cours des deux semaines suivantes. D'après Art Hartman, président de l'entreprise à cette époque, cette fermeture était due à la faiblesse des ventes dans une économie au ralenti. Le 9 juillet 1982, GWG Ltd. (Saskatoon) refermait pour la dernière fois ses portes.

Pour en savoir plus sur GWG en temps de guerre